Données Findex 2021 : perspectives pour stimuler l’inclusion financière en Afrique
Le taux de possession et d'utilisation de comptes financiers a connu une progression remarquable en Afrique subsaharienne au cours des dix dernières années, indéniablement stimulée par l'argent mobile. En 2021, les 11 économies comptant davantage d'adultes en possession d'un compte d'argent mobile que d'un compte dans une institution financière se situaient en Afrique subsaharienne. Mais en matière d’inclusion financière, la région est à la traîne en ce qui concerne l'écart entre les sexes et les indicateurs relatifs à la valeur des services financiers. Des efforts supplémentaires sont nécessaires pour consolider la progression de l'inclusion financière en Afrique subsaharienne, en particulier sur la question de l'accès aux services et de l’amélioration de la valeur des produits financiers pour les utilisateurs.
Entre 2011 et 2021, c’est en Afrique subsaharienne que le taux de possession de compte a connu la croissance la plus rapide, et entre 2014 et 2021, la région a également enregistré l’augmentation la plus rapide du taux d'utilisation des comptes (avec l'Asie du Sud). Le taux de possession de compte a plus que doublé, passant de 23 % en 2011 à 55 % en 2021, alors que la croissance moyenne mondiale était de 50 % (le taux qui s’élevait à 51 % en 2011 est passé à 76 % en 2021). La croissance impressionnante du taux de possession de compte en Afrique subsaharienne n'est pas surprenante si l’on considère que certaines régions comme l'Europe et l'Asie centrale avaient une base de référence relativement élevée en 2011. Cependant, malgré cette croissance, les données Findex 2021 montrent que l'Afrique subsaharienne se place toujours parmi les trois dernières régions du monde en termes de possession et d'utilisation réelles de compte. La base Findex 2021 montre également que le Nigeria, le pays le plus peuplé de la région, fait partie des sept économies qui concentrent collectivement plus de la moitié des adultes non bancarisés dans le monde.
La diversité des cas d'utilisation de l'argent mobile en Afrique subsaharienne est également édifiante. La monnaie électronique n'est plus seulement un moyen de paiement de particulier à particulier, mais facilite d'autres transactions financières telles que le versement des salaires, le paiement des commerçants, le règlement des factures de services publics et l'épargne.
Quatre opportunités pour faire progresser l'inclusion financière en Afrique subsaharienne
Bien que les avancées constatées en Afrique subsaharienne soient significatives, d'autres opportunités s’offrent encore à la région pour stimuler l'inclusion financière. En voici quatre exemples :
1. Améliorer la santé financière des ménages
Selon le Financial Health Network, la santé financière est un indicateur permettant d’évaluer si les modalités de dépense, d’épargne, d’emprunt et de planification financière des ménages sont de nature à leur permettre de résister aux chocs et de saisir les opportunités – un critère clé de la qualité des services financiers. La base de données Findex 2021 montre que l'Afrique subsaharienne est l'avant-dernière région au monde, après l'Asie du Sud, dans laquelle un individu peut accéder à des fonds, facilement ou sans grande difficulté, dans un délai de 30 jours en cas d'urgence. Selon les mêmes données, l'accès aux moyens financiers d'urgence est plus difficile pour les femmes que pour les hommes. Environ un tiers des adultes d'Afrique subsaharienne comptent sur la famille et les amis pour obtenir de l’argent en cas d'urgence, mais pour plus de la moitié d'entre eux, il est très difficile d’y parvenir. En outre, l'inquiétude concernant le paiement des frais de scolarité est beaucoup plus fréquente en Afrique subsaharienne, tout comme la préoccupation relative aux frais médicaux : c’est en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud qu’elle est la plus forte.
Les préoccupations au sujet du paiement des frais de scolarité et des dépenses médicales présentent une opportunité pour les prestataires de services financiers (PSF) : elles leur donnent l’occasion de développer des services financiers innovants propres à favoriser l'accès aux soins de santé, à l'éducation et à d'autres services essentiels. En outre, étant donné qu'un adulte sur trois en Afrique subsaharienne n’est pas en mesure d’utiliser son compte sans aide, et que les femmes sont plus susceptibles que les hommes d'avoir besoin d’une assistance, les acteurs du secteur financier pourraient également développer des programmes dédiés pour promouvoir l’éducation financière et numérique, en particulier chez les femmes. Soutenus par des programmes efficaces d'éducation financière et numérique, environ huit millions d'adultes non bancarisés en Afrique subsaharienne recevant des prestations gouvernementales en espèces pourraient accéder à des services financiers formels et améliorer leur bien-être.
2. Combler l'écart de genre en matière d'inclusion financière
À l'échelle mondiale, l'écart de genre en matière de possession de compte s'est réduit au cours des dix dernières années. Mais en Afrique subsaharienne, cet écart est passé de 5 % en 2011 à 12 % en 2021, soit le triple de la moyenne mondiale et le double de celle des autres régions en développement. Si les femmes possèdent plus de comptes financiers que les hommes en Afrique du Sud, les données Findex 2021 montrent que l'écart entre les sexes dans des pays comme la Côte d'Ivoire et le Nigeria est à l’inverse très marqué – 27 % et 20 % respectivement.
Entre 2017 et 2021, la croissance du taux de possession et d'utilisation de comptes d'argent mobile en Afrique subsaharienne était plus forte chez les femmes que chez les hommes. Mais le pourcentage de femmes ayant utilisé l’argent mobile pour épargner, payer leurs achats chez les commerçants et régler leurs factures de services publics était inférieur à celui des hommes. Par exemple, en 2021, seules 11 % des femmes avaient payé leurs services publics par argent mobile, contre 37 % des hommes.
Un ensemble combiné d'initiatives peut contribuer à intégrer davantage de femmes dans le secteur financier formel en Afrique subsaharienne. Pour commencer, les acteurs de l'inclusion financière doivent chercher à comprendre ce qui pousse les femmes à utiliser les services informels, s'attaquer aux normes de genre et réduire les risques liés à la consommation de services financiers numériques, qui peuvent miner la confiance des femmes dans les services financiers formels.
3. Développer des systèmes d'identification efficaces
Environ un tiers des adultes non bancarisés en Afrique subsaharienne ne possèdent pas les documents nécessaires pour ouvrir un compte financier. Ce pourcentage est plus élevé encore au Liberia, à Maurice, au Mozambique, au Soudan du Sud et en Tanzanie, où plus de 40 % d'entre eux n'ont pas les documents requis. Par le développement de systèmes collaboratifs de vérification de l'identité des clients, les acteurs de l'inclusion financière en Afrique subsaharienne disposent d’un moyen de démocratiser l'inclusion financière et l'accès aux services essentiels.
4. Tirer parti des données numériques alternatives
Les acteurs du secteur financier peuvent également tirer parti des gros volumes de données générés par l'économie numérique et développer des mécanismes efficaces pour partager ces données et créer des mécanismes pour offrir un meilleur accès et une meilleure utilisation des services financiers, et à soutenir la résilience des personnes à faibles revenus. Toutefois, compte tenu de la multiplication des incidents liés à l'utilisation abusive des données, il est essentiel de veiller à la mise en place de cadres réglementaires et d'approches de protection des données adéquats, car les utilisateurs de services financiers accordent une grande importance à la confidentialité des données.
Les progrès de l'inclusion financière en Afrique subsaharienne offrent d'excellentes opportunités pour stimuler la croissance économique dans la région, car l'inclusion financière est un catalyseur du développement durable. Mais pour maintenir la dynamique de progression de l'inclusion financière, il faut que les acteurs du secteur financier déploient des efforts concertés non seulement pour promouvoir l'accès et l'utilisation, mais aussi pour améliorer la qualité des services financiers, tout en veillant à ce que la protection des consommateurs de services financiers soit au cœur de ces efforts.