Retour sur 10 ans de microfinance et d'inclusion financière
Lancé chaque année par Convergences lors du Forum Mondial Convergences, qui a eu lieu cette année les 5 et 6 septembre, le baromètre de la microfinance (BMF) retrace et analyse les mutations du secteur. Pour son 10e anniversaire, il revient sur 10 ans d’évolutions de l’inclusion financière et de la microfinance dans le monde.
Un secteur en croissance depuis 2009
Le baromètre retrace les grandes tendances du secteur grâce aux chiffres du MIX Market, basés sur les données fournies par 916 institutions. Au cours des 10 dernières années, les IMF (Institutions de Microfinance) ont prêté des centaines de milliards de dollars, avec un taux de croissance annuel moyen de 11,5% sur les cinq dernières années.
Le nombre d’emprunteurs a poursuivi son augmentation, bien qu’à un rythme inférieur à celui des années 2000-2010, enregistrant une croissance annuelle moyenne de 7% depuis 2012. En 2018, ce sont 139,9 millions d’emprunteurs qui ont bénéficié des services des IMF. Parmi eux, on compte 80% de femmes et 65% de ruraux.
En outre, les IMF ont amélioré leur efficacité ces dix dernières années. Malgré une forte hausse du coût par emprunteur (+ 56% entre 2009 et 2018), le ratio de dépenses opérationnelles est en baisse de 2,7 points sur la période.
Des disparités selon les régions du monde
Face à l’inclusion financière, toutes les régions du monde ne sont pas égales, en témoigne la grande variété des défis à relever.
- L’Asie du Sud est la région la plus dynamique du monde en termes de microfinance. Elle compte le plus grand nombre d’emprunteurs (85,6 millions en 2018). Les trois premiers marchés en termes d’emprunteurs (Inde, Bangladesh, Vietnam) font par ailleurs partie de cette région. Toutefois, l’Asie du Sud ne se hisse qu’à la deuxième place en termes de volume de portefeuille de crédit.
- L’Amérique latine et les Caraïbes ne sont pas en reste, puisqu’elles concentrent 44% du portefeuille total du secteur de la microfinance. Cette région est la deuxième en termes de nombre d’emprunteurs (22,2 millions en 2018). Malgré ces résultats encourageants, l’Amérique latine est caractérisée par un faible taux de pénétration dans les régions rurales (seulement 23% des clients des IMF sont des ruraux).
- Loin derrière ces deux chefs de file, les pays de l’Europe de l’Est, de l’Asie centrale et de la région MENA constituent des marchés de tailles plus modestes. Le nombre d’emprunteurs a toutefois augmenté de plus de 30% depuis 2012 en Europe de l’Est et en Asie centrale : ils étaient 2,5 millions en 2018. Ombre au tableau, les IMF de ces deux régions sont celles qui comptabilisent le moins de femmes parmi leurs emprunteurs (49% en Europe de l’Est et en Asie centrale, 60% dans la région MENA).
- En Afrique, le nombre d’emprunteurs a connu une augmentation de 46% depuis 2012 pour atteindre les 6,3 millions de clients en 2018. Malgré un portefeuille de faible qualité et des coûts par emprunteur élevés, le portefeuille continue à afficher un rendement important (20%), mais en baisse de 6,6 points.
- Enfin, en Asie de l’Est et du Pacifique, on relève 73% de clients et 79% d’emprunteurs ruraux. Les IMF de la région poursuivent leur croissance : en 2018, on relève 20,8 millions de bénéficiaires.
En Afrique, le nombre d’emprunteurs a connu une augmentation de 46% depuis 2012 pour atteindre les 6,3 millions de clients en 2018.
La microfinance au service des ODD
Depuis 2010, la microfinance a traversé bien des épreuves : crise de confiance, perte de crédibilité, manque de réglementation. Toutefois, le secteur s’est davantage structuré, notamment avec la création de la Social Performance Task Force (SPTF), qui réunit aujourd’hui plus de 3000 organisations promouvant des pratiques responsables, et de la Smart Campaign, qui vise à intégrer la protection des consommateurs dans les activités des IMF.
Les années 2014 à 2016 ont constitué une nouvelle étape, avec notamment l’utilisation grandissante des nouvelles technologies. En 2015, c’est 34% de la population d’Afrique subsaharienne qui a accès à des services financiers via le mobile money. Les partenariats entre IMF, fintech et opérateurs permettent ainsi d’améliorer l’impact de la microfinance et sa portée.
En 2016, un an après l’adoption des Objectifs de Développement Durable (ODD), il devient clair que la microfinance dépasse le simple accès au crédit. Elle favorise également l’accès aux services essentiels et ouvre de nouvelles opportunités dans les domaines de l’agriculture, de l’énergie, de l’habitat ou encore de l’éducation.
Influent au-delà de ses frontières initiales, le secteur de la microfinance est loin d’être détrônée par l’impact investing. Pour Michael Knaute, directeur régional Afrique et MENA pour Triodos IM, cité dans un article du baromètre 2017, « l’application des leçons apprises dans la microfinance au cours des trois dernières décennies au secteur de l’impact investing aidera à tracer la voie vers la réalisation des ODD ».
Avec un montant de 124 milliards de dollars de prêts octroyés au niveau international et une croissance de 9,5% du nombre de clients en 2018, le secteur de la microfinance a de beaux jours devant lui. Et s’il n’a plus le monopole de l’investissement à impact, il n’est demeure pas moins un acteur essentiel du développement durable.
Pour en savoir plus, vous pouvez télécharger le baromètre de la microfinance 2019 en cliquant sur ce lien.
L’ensemble des données ci-dessous est fourni par des prestataires de services financiers au réseau MIX Market. Le MIX tente de recueillir des données auprès des principaux acteurs de chaque marché afin de garantir la visibilité de tous les marchés. Toutefois, MIX ne recueille pas de données sur l’intégralité des acteurs de chaque pays.