Quatre temps forts de la Semaine Africaine de la Microfinance
Le Portail FinDev était à la quatrième édition de la Semaine Africaine de la Microfinance, qui s’est déroulée du 21 au 25 octobre 2019 à Ouagadougou, au Burkina Faso. Après une première édition en 2013 à Arusha (Tanzanie), les éditions suivantes à Dakar (Sénégal) en 2015 et Addis-Abeba (Ethiopie) n’ont cessé de prendre de l’ampleur. Depuis ses débuts, la SAM ambitionne de devenir une plateforme africaine commune de réflexions et d’échanges entre les différents acteurs de la microfinance : investisseurs, IMF, chercheurs, banques, réseaux, innovateurs, gouvernements, ONG…
Après une semaine passionnante, remplie de conférences, de formations et de débats, le Portail FinDev revient sur les temps forts de l’événement, qui a rassemblé plus de 900 participants venus de toute l’Afrique et d’ailleurs.
- Oui, la finance inclusive a son rôle à jouer pour atteindre les ODD en Afrique
Les ODD prévoient des avancées majeures d’ici 2030 sur le plan de l’amélioration des conditions de vie, de travail et de réduction des inégalités. Comme développé lors de la séance plénière d’ouverture du mardi 22 octobre, la finance inclusive peut être utilisée comme levier de développement pour faire face à plusieurs de ces challenges, dont notamment l’ODD 1 (éliminer la pauvreté), l’ODD 2 (éliminer la faim, assurer la sécurité alimentaire, améliorer la nutrition et promouvoir l’agriculture durable) et l’ODD 5 (parvenir à l’égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles).
Au cours des dernières années, le secteur de l’inclusion financière a développé des innovations et contribué à la réalisation de ces ODD. Malgré de belles avancées, il reste toutefois de nombreux défis à relever. Conflits, catastrophes naturelles, sécheresse liée au changement climatique : autant de bouleversement qui perturbent la mise en place de ces ODD.
Pour en savoir plus, découvrez notre article sur le Baromètre de la microfinance 2019 « Retour sur 10 ans de microfinance et d'inclusion financière », ainsi que notre interview de Laura Foschi, directrice exécutive de l'ONG luxembourgeoise ADA.
- La digitalisation ou la mort ?
La transition digitale a été au cœur des cinq jours de la SAM. Alors qu’en Afrique, seulement 33% des adultes disposent d’un compte auprès d’une institution bancaire (Global Findex Database 2018), le digital constitue une opportunité pour combler ce fossé. Toutefois, cette transition est parfois difficile à appréhender pour les acteurs du secteur. Ce que la SAM a tenté de démontrer au cours de ces 5 jours de conférences et de formations, c’est qu’il est essentiel de démystifier la transition digitale. Transformation numérique responsable, révolution de la finance digitale, Mobile Money, opportunités du Big Data… Autant de sujets qui ont été abordés lors de conférences. Leader mondial de l’argent mobile avec 21% d’utilisation chez les adultes, l’Afrique a un sérieux potentiel à développer notamment par le biais de partenariats avec d’autres acteurs du secteur. Une tendance qui constitue une opportunité unique pour les fournisseurs de services financiers.
Lors de la session « Révolution de la finance digitale : impacts, innovations, défis et solutions » du mardi 22 octobre, qui a rassemblé un large panel d’intervenants issus de ADA , FCPB, Société Générale, UNCDF, GSMA, Orange Money et Accion, les orateurs ont échangé sur l’impact du mobile money sur la résilience économique. Permettant d’améliorer la qualité de l’offre de services, la gestion du crédit et d’inclure les populations exclues du système bancaire traditionnel (essentiellement des femmes, des ruraux et des jeunes), le digital s’impose. Le rôle des Fintech se précise de plus en plus avec toutefois deux limites : la qualité des infrastructures et les cybermenaces.
Pour aller plus loin, lisez notre interview de Mohamed Asri, directeur microfinance et inclusion financière au sein de HPS, « La digitalisation ou la faillite : quelles perspectives pour les IMF et l'inclusion financière ? ». Mais aussi l’article écrit par Elisabeth Rhyne « La microfinance à l’ère digitale : sept questions essentielles pour le futur du secteur ».
- Le changement climatique concerne tout le monde, même les institutions financières
L’Afrique fait partie des régions du monde les plus vulnérables au changement climatique. Cyclones, inondations et sécheresses peuvent avoir des conséquences catastrophiques sur la santé des populations, leur résilience et sur les récoltes. Parmi les effets pervers du changement climatique, on peut citer les conséquences sur l’agriculture et l’utilisation des terres, la destruction d’actifs et l’augmentation du prix des denrées, menaçant la sécurité alimentaire. De plus, des personnes qui sortent de la pauvreté peuvent y rebasculer suite à un évènement climatique extrême.
De quoi faire peur aux IMF, certaines préférant se retirer après de mauvaises expériences. Lors d’une formation qui a eu lieu le lundi 21 octobre, la Fondation Grameen Crédit Agricole a présenté devant un public majoritairement composé d’IMF les stratégies d’adaptation qu’elles peuvent mettre en œuvre. Parmi les motivations d’agir auprès des publics à risque, on peut citer les attentes des investisseurs, les exigences réglementaires, l’amélioration de la qualité du portefeuille et la responsabilité sociale.
Les thèmes du changement climatique et du monde rural ont été largement abordés tout au long de la conférence, avec des sessions dédiées au financement de la résilience économique face aux changements climatiques. Mais aussi des conférences sur les innovations financières qui transforment la finance rurale et la vie des campagnes, la collaboration multisectorielle pour accroître les opportunités rurales…
Pour en savoir plus à ce sujet, lisez notre interview d’Eric Campos, délégué général de la Fondation Grameen Crédit Agricole, sur l’adaptation des IMF au changement climatique.
- L’emploi des jeunes, l’un des principaux défis à venir pour l’Afrique
D’après les chiffres de l’UNICEF, près de 50% de la population africaine est aujourd’hui composée de jeunes de moins de 18 ans et d’ici 2030, la population africaine de moins de 18 ans augmentera de 170 millions. Comme développé lors de la session « maximiser le potentiel des jeunes : défis et solutions pour l’inclusion économique de la jeunesse », qui s’est déroulée le mercredi 23 octobre, il est urgent de développer des produits financiers qui vont avec les besoins des jeunes.
Comprendre leurs besoins, c’est également créer des opportunités économiques dans des régions sensibles comme le Sahel, où le désœuvrement peut mener à l’augmentation des conflits. Pour UNCDF, il est crucial d’engager les jeunes le plus tôt possible, pour leur donner une meilleure compréhension de la gestion financière. Pour AMIR (Association of Microfinance Institutions in Rwanda), l’éducation financière doit s’adapter à l’entrepreneuriat. Les produits d’épargne et de crédit doivent s’adapter à cette réalité. Les jeunes remboursent les crédits, le véritable défi consistant à les accompagner. Les incubateurs ont été également au centre des conversations au cours de cette 4e édition de la SAM, notamment lors de la foire aux investisseurs et lors du village des innovateurs.
Pour en savoir plus, lisez notre interview de Hannah Hilali et Maria Teresa Zappia « Financer l’éducation : quels nouveaux défis pour les institutions financières », ainsi notre interview d'Enda Tamweel, lauréat du Prix d'excellence Sanabel au service des jeunes.