Et si on rendait les modes de cuisson non polluants accessibles à tous ?
A l’échelle mondiale, 3,8 millions de décès prématurés sont attribués chaque année à la pollution de l’air intérieur.
Près de 3 milliards de personnes cuisinent encore avec des combustibles polluants, comme par exemple le charbon, le bois de chauffage ou encore le pétrole. Ces combustibles émettent de la fumée contenant des particules nocives, affectant la santé de millions de femmes et d’enfants dans les pays en développement.
Le gaz distribué en bonbonnes (également connu sous le nom de gaz de pétrole liquéfié ou GPL) est l’un des rares combustibles approuvés par l’Organisation Mondiale de la Santé. En raison de sa combustion efficace et de son faible taux d’émission de particules, le GPL n’est pas nocif pour la santé et réduit le temps de cuisson. L’utilisation du GPL protège également les forêts en réduisant, voire en éliminant, la collecte de bois de chauffage et la production de charbon de bois.
Qu’est-ce qui empêche les gens de cuisiner avec du GPL ?
En Afrique, une grande partie des familles souhaite passer au GPL. Toutefois, certains ménages à faibles revenus hésitent à entreprendre cette transition. Les frais liés à l’achat du matériel nécessaire constituent la principale raison. En effet, un « kit de démarrage GPL » comprend une bouteille de gaz remplie, généralement de 13 kg, qui dure en moyenne un mois, ainsi qu’un réchaud double et ses accessoires pour un coût total oscillant entre 85 et 100 dollars.
De plus, ces bouteilles de GPL doivent être remplies tous les mois, ce qui nécessite une dépense importante en une fois, tandis que les combustibles tels que le charbon de bois peuvent être achetés en petite quantité tous les jours. Cela donne l’impression que le GPL est onéreux, alors qu’il ne coûte en réalité que 50 à 60 % du prix du charbon ou du bois de chauffage pour la cuisson d’un nombre équivalent de repas.
En Inde, le gouvernement subventionne les équipements GPL à destination des ménages à faibles revenus dans les zones rurales. Objectif : leur permettre de surmonter la barrière du coût initial. Dans les pays où ce soutien gouvernemental n’est pas à l’ordre du jour, des solutions innovantes de financement à la consommation peuvent aider les consommateurs à passer au GPL. C’est pourquoi le microfinancement et le système de « pay as you go » (prépayé) sont deux approches expérimentées en Afrique sub-saharienne.
Des microcrédits pour couvrir les coûts initiaux du GPL
Grâce à l’initiative pilote de microfinance GLPGP, Bottled Gas for Better Life, plus de 700 ménages à faibles revenus au Cameroun et au Kenya ont opté pour le GPL au cours des deux dernières années. Les prêts couvrent le coût d’un équipement de base pour GPL, sont remboursés en six mensualités et incluent un dépôt de garantie remboursable. Des calendriers de remboursement à taux fixes permettent aux clients à faibles revenus de planifier les dépenses au sein de leur foyer.
Les institutions de microfinance (IMF) kenyanes et camerounaises avec lesquelles nous collaborons évaluent les crédits et gèrent les prêts. Elles bénéficient de l’expérience acquise par GLPGP et par les spécialistes du marketing du GPL en matière de recrutement ciblé, d’information des clients, de campagnes de formation et de conseils sur les équipements durables.
Les résultats obtenus sont encourageants. 95% des prêts octroyés dans le cadre du projet pilote Bottled Gas for Better Life au Cameroun ont été remboursés.
Dans le cadre du projet pilote kenyan, le taux de remboursement est de 100% à ce jour grâce à la finance numérique, qui permet aux clients de rembourser facilement tous les mois.
Les retours des clientes ont été très encourageants, avec notamment une amélioration immédiate de leur état de santé.
Toutefois, nous avons relevé de nombreux challenges. Les IMF ont des seuils de tolérance variables en ce qui concerne les prêts à la consommation pour le GPL. Beaucoup préfèrent offrir des « prêts productifs » au lieu de prêts de consommation, et exigent donc des garanties contre les pertes éventuelles jusqu’à que cette prise de risque soit considérée comme acceptable.
Même si elles réduisent les risques de défaut de paiement, les critères de prêt et le processus de souscription bien établi des IMF sont parfois lents et difficiles à appréhender pour les emprunteurs non traditionnels. Dans le cadre du projet pilote kenyan, GLPGP a résolu ce problème en collaborant avec à la fois une grande banque de détail, Equity Bank, et avec la SEMA (Social Economic Mobilization Agency), un organisme-cadre regroupant plusieurs groupes d’épargne informels. Etonnamment, les groupes de la SEMA sont davantage plébiscités par les consommateurs que Equity Bank, apparemment en raison de la plus grande flexibilité de la SEMA et de la simplification des processus d’approbation.
PayGo : une approche alternative pour financer le GPL
Dans le cas d’une approche PayGo, les consommateurs payent habituellement de faibles droits d’adhésion et une commission continue couvrant les frais de services, en plus des frais de combustible. Les clients reçoivent à domicile une bouteille de GPL. La bonbonne est équipée d’un compteur intelligent qui mesure et régule la consommation de combustible en fonction des paiement effectués. Les clients déterminent la quantité de combustible nécessaire et établissent un calendrier de paiement. Les familles avec des revenus faibles ou variables en fonction des saisons peuvent commander au minimum 0,30 dollars de GPL par jour. Le compteur alerte le client et l’entreprise lorsque le niveau de carburant est bas, afin de changer la bonbonne dans les temps. PayGo réduit les barrières à l’entrée, l’achat de l’équipement complet n’étant pas requis (bien que l’accord de PayGo n’inclue pas forcément le coût d’un four).
Alors que la microfinance requiert une coordination très étroite entre l’IMF et le distributeur de GPL, les clients PayGo interagissent avec un seul fournisseur de service pour leurs paiements et la maintenance de leurs équipements. Bien qu’avantageuse pour le consommateur, cette approche implique plus de responsabilités pour le fournisseur PayGo puisqu’il doit recruter des experts en financement, en recouvrement et en livraison de GPL. Cela signifie également que les coûts initiaux sont plus élevés pour l’entreprise, car le compteur intelligent est onéreux (actuellement plus cher que la bonbonne), ce qui réduit les marges initiales. Ces entreprises doivent également supporter un risque élevé de non-paiement, notamment en cas de problème affectant la capacité de paiement des clients, comme on a pu l’observer lors de sécheresses ou d’autres catastrophes naturelles.
PayGo a été largement plébiscité au cours des sept dernières années pour étendre la fourniture d’électricité solaire hors-réseau aux populations à faibles revenus. Toutefois, il s’agit d’un modèle de financement de la consommation assez récent, en particulier dans le contexte de l’accès au GPL. Au fil du temps, il deviendra plus facile de déterminer si ce modèle est adapté pour étendre l’accès aux modes de cuisson propres, dans quel pays et s’il peut être utilisé par des clients périurbains et ruraux d’un point de vue durable et commercial. Dans les faits, certaines entreprises de panneaux solaires hors-réseau envisagent d’ajouter un composant PayGo pour le GPL en vue de diversifier leurs sources de revenus, optimisant ainsi leur expertise actuelle avec ce modèle de paiement.
Nous devons soutenir les deux approches pour augmenter l’utilisation du GPL
Après avoir soutenu Bottled Gas for Better Life dans deux pays et collaboré avec des fournisseurs PayGo, GPLPGP considère qu’il n’existe pas d’approche unique pour financer des appareils de cuisson sains à destination des personnes pauvres.
Toutefois, ces deux approches sont prometteuses et permettent d’atteindre les consommateurs exclus. Elles doivent être davantage soutenues pour fournir de nouveaux canaux permettant d’adapter la mise en œuvre de l’objectif de développement durable numéro 7, dont le but est de fournir à tous des combustibles de cuisson propres et modernes d’ici à 2030.
Bonjour
je trouve très interessant ce projet de GPL. Au Sénégal, dans notre organisation de la société civile Action Solidaire International, nous avons chérché à résoudre la problématique de la coupe de bois et son usage massif en cuisine à travers un projet de vulgarisation de fourneaux institutionnels via un système de micro-leasing. En termes de remboursement le résultat est très mitigé mais serait surtout lié au coùt du fourneau.
Nous serions très intéressés à travailler sur le GPL certainement en collaboration avec une PMI qui fabrique des fours au Sénégal avec des IMF partenaires.
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